Urgence - Hyperkaliémie

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URGENCES – METABOLISME ET ENDOCRINOLOGIE

 

P 426

 

HYPERKALIEMIE

  • Pièges et points importants

-          Seuls les transferts transmembranaires de potassium permettent une baisse immédiate de la kaliémie : le bicarbonate et l’insuline sont les traitements de l’urgence gravissime

-          L’acidose entraîne une hyperkaliémie de transfert

-          L’hyperkaliémie est en général « fausse » en l’absence de cause évidente d’hyperkaliémie et de signes ECG

-          L’ECG est obligatoire en cas de kaliémie > 5 mmol / l.

 

  • Biologie

-          Définition : K+ > 5 mmol/l

-          Eliminez une pseudo-hyperkaliémie induite :

  • o    Soit par une ponction veineuse en aval d’un garrot fortement et longuement serré ;
  • o    Surtout par les manœuvres de pompage avec la main (N Engl. J Med. 1990), destinées à faire gonfler les veines avant ponction
  • o    Soit par une hémolyse du prélèvement veineux : cela est en principe indiqué par le laboratoire
  • o    Rarement par une thrombocytose ou leucocytose extrêmes

-          Evoquez une pseudo – hyperkaliémie en l’absence de cause évidente d’hyperkaliémie, et de signe ECG. Demandez alors un contrôle sans garrot et sans faire « pomper » avec la main, en prévenant le laboratoire.

-          Pour le diagnostic étiologique, analysez aussi Na, Cl, urée, créatininémie, CO2T et trou anionique (Na-Cl-CO2T, N=12+-4 mmol/l) +- gaz du sang artériels +- enzymes musculaires (CPK, SGOT) et ionogramme urinaire

 

  • Signes cliniques

-          Tardifs et exceptionnels : paresthésies distales des membres, de la langue et des lèvres, voire paralysie flasque

 

  • Signes ECG

-          Anomalies diffuses de l’ECG. Pas de corrélation très fiable avec l’intensité de l’hyperkaliémie mais les anomalies de l’onde T sont quasi-constantes au-delà de 6 mmol/l. Les anomalies ECG sont accentuées par une éventuelle acidose.

-          D’abord : onde T ample, pointue, à base étroite, mieux vue en DII-III, V2-4.La polarité de l’onde T n’est pas modifiée (positive en D1, D2, D3, VL, VF et de V2 à V6)

-          QT est normal voire raccourci. Le segment ST prend un aspect en « italique », puis devient difficile à individualiser, la fin de l’onde S se confondant avec le début de T.

-          Puis, allongement de PR et diminution d’amplitude de l’onde P. On peut observer un BAV – III ou des paralysies sinusales.

-          Au-delà de 7,5 mmol/l : troubles diffus de la conduction intraventriculaire responsables d’un élargissement des complexes QRS dans toutes les dérivations avec une onde S large et profonde dite « en lame de sabre ».

-          Au stade ultime : rythme idioventriculaire lent à QRS très élargi annonçant la survenue imminente d’un arrêt circulatoire en asystolie ou fibrillation ventriculaire.

 

  • Critères de gravité

-          Sévérité (> 7 mmol/l)

-          Signes ECG avec ESV

-          Acidose

-          Choc

-          Hypocalcémie associée

-          Hypomagnésémie

-          Antiarythmiques

-          Cardiopathie

 

  • Causes

-          Kaliurie basse (<10 mmol/l) : stock potassique augmenté

  • o    Insuffisance rénale aigue

Acidose, hypercatabolisme azoté, rhabdomyolyse, sepsis

  • o    Insuffisance rénale chronique

Iatrogène : apport de potassium (sel de régime), diurétique épargneur de potassium

  • o    Hypocorticisme :
    • §   Insuffisance surrénale aigue, hyponatrémie, hypoglycémie et déshydratation
    • §   Hypoaldostéronismes primitifs ou secondaires : diabète, IEC, AINS, héparine
    • o    Diurétiques épargneurs de potassium : spirolactones, canrénone, triamtérène, amirolide. NB : Leur action dure 48 heures après arrêt (spironolactone, canrénone), 24 h pour les 2 autres.

-          Hyperkaliémie sans augmentation du stock de potassium

  • o    Iatrogène par apport de K+
  • o    Transfert plasmatique de K+ cellulaire
    • §   Acidoses métaboliques
    • §   Lyses cellulaires :
      • ·          Rhabdomyolyse traumatique ou toxique, effort musculaire intense
      • ·          Brûlures étendues
      • ·          Lyse tumorale : chimiothérapie des leucémies ou des lymphomes
      • §   Médicaments :
        • ·          Intoxication, digitalique, beta bloqueurs
        • ·          Succinylcholine (Celocurine), solutions d’arginine ;
        • ·          Paralysie périodique : hyperkaliémique : paralysies < 60 mn faisant suite à un effort, en rapport avec une hyperkaliémie de transfert.

 

  • Traitement

-          Urgent, sauf en cas d’hyperkaliémie modérée (< 6 mmol/l) sans manifestation électrique et de cause rapidement curable (iatrogène)

-          En cas d’hyperkaliémie menaçante : transfert en réanimation après mise en route du traitement

-          Arrêt de tout apport de potassium (attention aux solutés de perfusion tout prêts de la Pharmacie Centrale qui en contiennent) et de tout traitement hyperkaliémiant.

 

-          Les moyens d’action

Diminuer l’absorption intestinale du K+ : résines échangeuses d’ion.

Augmenter l’excrétion urinaire : furosémide. Faire entrer le potassium dans les cellules : (alcalinisation, glucose + insuline).

Antagoniser l’effet cardiaque du potassium : sel de calcium. Eliminer le potassium par voie extra-rénale : hémodialyse, dialyse péritonéale.

 

-          En cas d’anomalies électriques sévères, même en l’absence d’acidose :

Gluconate de calcium (contre indiqué en cas de traitement digitalique). Pour corriger rapidement (moins de 5 mn) mais très transitoirement (durée d’action de 30 mn) un trouble de conduction : injectez IVD 10 ml de gluconate de calcium à 10 % renouvelable 5 mn plus tard.

-          En cas de traitement digitalique : bicarbonate de Na semi-molaire à 42 pour 1000 : 100 ml (ou molaire à 84 pour 1000 : 50 ml) en 5-15 mn IV. Efficace en 15-30 mn pendant 1-2 h. Renouvelable 1 fois. NB : Risque d’OAP car cela apporte 1,15 g de Na. Ce risque paraît négligeable dans cette circonstance, où l’on peut associer du Laislix.

-          Glucose + insuline : indication en cas de K+ > 7 mmol/l ou de signes ECG plus graves que des ondes T modifiées. Glucosés à 30 % : 500 ml + 30 unités d’insuline ordinaire, en 30-45 mn,. Effet en 15 à 30 mn ; durée 4 à 6 heures.

Moins efficace, moins veinotoxique : G 10 % 500 ml + 10 unités d’insuline. Mêmes délais d’action. En cas d’anurie ou d’insuffisance ventriculaire gauche, l’apport hydrique peut favoriser la survenue d’un œdème pulmonaire.

-          Lasilix : en cas de perfusion de bicarbonate, sur indication du réanimateur. Sans effet en casd’nurie. En cas d’insuffisance rénale à diurèse conservée, les doses nécessaires sont parfois très fortes (jusqu’à 1000 mg et doc IV en 30-60’ si plus de 120 mg). Délai d’action : 15 à 30 mn et durée 4 à 6 heures. Compensation hydrosodée adaptée à l’état d’hydratation du patient.

-          Résines échangeuses d’ions : à utiliser si K+ > 5 mmol/l

  • o    Kayexalate : échange K+ contre Na+, fixant 1 à 2 mmol de potassium par gramme de résine. A diluer dans de l’eau et associer à du Sorbitol : 2 sachets. Voie orale ou sonde gastrique (30 g toutes les 6 heures) ou en cas de vomissements : voie rectale (50 g toutes les 6 heures) si le lavement peut être gardé. Délai d’action : 2 heures per os, 1 h en lavement environ, l’effet dure de 4 à 6 heures. Induit un apport sodé. On peut le remplacer en cas d’insuffisance cardiaque ou d’anurie par le :
  • o    Calcium Sorbistérit qui fixe 1 mmol de K+ par gramme de résine, échangé contre le Ca++. 30 g = 1,5 cuillère – mesure toutes les 6 heures. A diluer dans de l’eau et associer à du Sorbitol : 2 sachets.

-          Epuration extra rénale :

Les hyperkaliémies menaçantes sont le fait d’affections non rapidement réversibles (insuffisance rénale aigue ou chronique terminale, rhabdomyolyse). Dans ces cas, les traitements médicamenteux sus-cités permettent d’attendre l’épuration extra-rénale qui normalise rapidement la kaliémie et le pH.

   

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